Par Barbara Romagnan
Depuis le 25 mai, se tient, à l’assemblée nationale le débat sur la réforme territoriale. Le projet de loi a déjà été adopté par le Sénat, il a été soumis au vote des députés le 8 juin et adopté par une faible majorité de 276 voix pour à 240 contre. Seul le groupe UMP s'est prononcé en faveur de la mesure.
Le texte est complexe, mais les enjeux n’en sont pas moins cruciaux,
Dès 1982, l’Etat s’est progressivement dessaisi d’un certain nombre de prérogatives au profit de collectivités territoriales et autres structures intercommunales, pensant qu’elles seraient mieux exercées plus près des citoyens et répondraient mieux aux besoins d’organisation et de gestion des territoires.
Aujourd’hui presque toutes les familles politiques reconnaissent que la nouvelle organisation pose un certain nombre de problèmes qui rend la situation peu lisible pour le citoyen : empilement des structures qui multiplie les niveaux de décision, enchevêtrement des compétences, financements croisés, insuffisance démocratique…
Dans ce contexte, Nicolas Sarkozy et le gouvernement proposent une réforme qui est loin de répondre aux interrogations. Par certains aspects, elle apparaît surtout comme une manœuvre politicienne dirigée contre les forces de gauche qui détiennent l’essentiel du pouvoir territorial. Et, loin de s’attaquer au problème de l’empilement des structures, il en rajoute de nouvelles.
Autre exemple de mauvaise réponse, le conseiller territorial.
Le conseiller territorial sera une sorte de « super conseiller général ». Ce nouvel élu, au contour abscons, résulte de la non décision de supprimer l’une ou l’autre des collectivités, départementale ou régionale. La réforme risque donc de renforcer les logiques de professionnalisation politique, de notabilisation et de concentration du pouvoir local. Elu dans un cadre infra-départemental, le conseiller territorial sera sans doute moins enclin à dégager un intérêt général régional et à s’affranchir d’une vison purement localiste des enjeux.
De plus, le conseil régional risque de voir s’éroder sa légitimité et aura du mal à trouver des élus qui porteront des projets d’intérêt régional, transversaux, détachés de la représentation de micro-territoires. La démocratie c’est aussi le projet et le débat, une capacité à s’extraire du territoire et de ses pesanteurs notabiliaires.
Enfin, ce mode de scrutin ferait de fait diminuer encore la part des femmes parmi les élus locaux, car il généralise l’esprit des scrutins cantonaux.
Ainsi, il pourrait être préférable de régionaliser les départements (scrutins proportionnels, administrations et compétences...) que de départementaliser la Région comme le ferait, de fait, la création du conseiller territorial.